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Le sens commun oppose souvent les “matheux” aux “littéraires”, comme si les premiers n’avaient pas besoin du français pour apprendre les mathématiques.  La langue maternelle n’est-elle pas un outil de base pour développer aussi des compétences mathématiques ?  Qu’en pensez-vous ?
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On parle de langage mathématique, souvent en faisant référence au seul lexique symbolique. Or, les concepts mathématiques de base s'enrichissent de leur expression dans différents registres. Ainsi pour évoquer la multiplication (par exemple de 7 par 5), un enfant peut utiliser le registre symbolique (7 x 5 ou 5 x 7), le registre verbal (il parlera par exemple du produit de 7 par 5, de 7 multiplié par 5 ou de 5 fois 7) ou encore ce que certains appellent le registre analogique (en pensant par exemple à un quadrillage rectangulaire de 5 lignes sur 7 colonnes). La capacité à mobiliser à bon escient chacun de ces registres et à les mettre en relation contribue à la conceptualisation de la multiplication. Pour calculer mentalement 14 x 5, il peut être utile de penser que c'est 5 fois 14 qui peut être décomposé en 5 fois 10 plus 5 fois 4 ou que c'est la moitié de 10 fois 14.
Le recours au langage analogique permet, lui, d'aider à comprendre le raisonnement mis en œuvre :
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Pour un jeune enfant, le langage symbolique 14 x 5 = (10 + 4) x 5 = (10 x 4) + (5 x 4) permet davantage d'exprimer le calcul réalisé que de le penser (ce qui évoluera lorsqu'auront été explicitement étudiées les propriétés des opérations et les règles de calcul qui en découlent).

Comme le montreraient d'autres exemples, notamment dans le domaine géométrique, les mathématiques s'expriment à la fois dans la langue courante et dans une langue spécifique, les articulant le plus souvent. Sans préjuger d'une opposition (souvent mise en défaut…) entre "littéraires" et "matheux", il faut d'abord souligner que les concepts et les raisonnements mathématiques font un large recours à la langue maternelle.


Roland Charnay

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Les mathématiques s’écrivent entre autre au moyen de signes, de codes mathématiques dont l’usage est régi par une grammaire et syntaxe spécifiques. Cette langue écrite est universelle. Néanmoins pour commenter, faire valoir les objets ou phénomènes mathématiques, pour échanger, communiquer à leur sujet, on recourt à sa langue naturelle. Par ailleurs les mots désignant les objets ou phénomènes mathématiques appartiennent en partie à la langue naturelle. Mais ils n’ont pas nécessairement en mathématique le même sens que dans cette langue naturelle.
Apprendre à parler des mathématiques dans sa langue naturelle est un réel apprentissage à faire et ce faisant, il permet aussi d’enrichir l’apprentissage de sa langue naturelle. Toute activité mathématique est une activité d’amélioration de son langage si effectivement on se pose la question du sens, de la pertinence de ce qui est énoncé.

Françoise Lucas

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C’est dommage d’opposer les “matheux” aux “littéraires”. L’expérience montre que la première difficulté des élèves réside dans la compréhension du problème. Il faut repérer et retenir les informations utiles et inutiles. Se représenter la situation. Repérer la question. Relire le texte… Pour être “bon” en maths il est préférable d’être bon en français. Pour comprendre, démontrer, raisonner, argumenter, la maîtrise de la langue et de sa logique est une aide précieuse et indispensable. Peut-être que l’on peut être bon en français sans être bon en maths… ceci est une autre affaire.

Thérèse Eveilleau

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Une bonne maîtrise de la langue d’enseignement (qui, pour un certain nombre d’élèves, n’est d’ailleurs pas leur langue maternelle) est essentielle à la compréhension des mathématiques. C’est aussi un ‘outil de pensée’ qui peut jouer un rôle essentiel dans la construction même de certains apprentissages mathématiques, notamment à travers la mise en mot d’un raisonnement ou la clarification d’un symbolisme parfois mal interprété.


Annick Fagnant et Isabelle Demonty

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La langue : souci du mot juste, utilisation des connecteurs...tout ce qui assure la qualité dans la communication est indispensable pour l’enseignant qui doit s’exprimer avec justesse et sobriété.
Oui à des stratégies pédagogiques qui stimulent ces qualités chez l’élève mais non à un carcan d’exigences préalables. Il y a dans chaque classe quelques élèves dont l’expression orale et/ou écrite est déficiente et qui ont néanmoins des ressources et un intérêt pour le calcul, les maths. Il faut qu’ils puissent se développer sans être constamment pénalisés par leurs carences langagières. Certains pensent plus vite que leur capacité à dire et pensent bien ! Ils ont du mal, après coup, une fois la réponse trouvée, à reconstituer leur démarche ou plutôt, cela ne les intéresse plus. …
D’autres par contre ont une pauvreté de langage qui recouvre en fait une pensée floue. Ces derniers doivent être stimulés du côté du langage, corrigés, mais pénalisés avec prudence.

Exemples 
: l’élève qui lit : 3 sur 4 au lieu de 3 exposant 4 ;
qui ne saisit pas le sens du pronom relatif « dont » (quel est le nombre dont le carré est 4 ? ).


Françoise Van Dieren

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Je ne sais pas si la langue maternelle permet de développer des compétences mathématiques pures, mais il est évident qu’au delà même des techniques, face à un problème, c’est la langue qui est primordiale.
Comment faire résoudre un problème de mathématiques à un primo-arrivant, même s’il maîtrise parfaitement les techniques ???
Cela fait trois ans que je fais des séances décrochées sur le « vocabulaire des problèmes » pour apprendre à reconnaître l’opération qui se cache derrière certains mots : de plus, de moins, de plus que, de moins que, tant de fois plus, tant de fois moins, entre, couper, partager, des rangées de tant de ...
Mais, même pour les élèves dont le français est la langue maternelle, au delà du vocabulaire, c’est la syntaxe des énoncés mathématiques qui pose problème.
On analyse aussi à quels temps est écrit le problème pour savoir si l’action a été faite ou si elle doit être faite (exemple : Trois enfants ont partagé un rouleau de réglisse. Ils en ont 12 cm chacun. Combien mesurait le rouleau de réglisse ? Le mot « partagé » risquant de les aiguiller vers une division).
On transforme aussi des problèmes en problèmes inverses (addition soustraction ; multiplication division) .
On pose en outre des questions à la fin d’énoncés sans questions.
Maintenant je fais aussi des analyses de la syntaxe en géométrie, la forme gênant plus les élèves que le vocabulaire lui-même.

Elsa Pelestor