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On dit souvent que la première qualité d’une évaluation est d’être " objective " … mais cette recherche de l’objectivité n’est-elle pas un leurre ?

Toute démarche d’évaluation n’est-elle pas subjective en soi ?
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Elle ne sera subjective que si elle ne vise qu’une seule et même compétence : le savoir ! Bien sûr qu’il est important de vérifier celui-ci mais cela doit se faire tout au long de la scolarité d’un enfant, et non comme une évaluation objective si on ne respecte pas les rythmes d’apprentissage individuels ? Pour moi, la seule évaluation certificative ne devrait exister (et encore !) qu’à la fin du cycle primaire, toutes les autres n’ayant de sens que pour prendre des éléments de progression de chacun ainsi que des éléments mettant en exergue les difficultés rencontrées par chacun… Il nous faudra sur base de ces informations mettre en place des activités de différenciation et de remédiation pour essayer d’amener chaque élève au mieux de ses compétences pour pouvoir aborder l’étape suivante !
L’évaluation externe certificative actuelle est pour moi intéressante mais insuffisante car elle ne fait la part belle qu’aux savoirs et un peu au savoir- faire ; le savoir-être est complètement nié alors que beaucoup d’enfants possèdent en eux des richesses qu’on ne peut pas prendre en compte dans l’évaluation certificative actuelle ! Chez nous le chef-d’oeuvre
1 remplit amplement cette fonction et nous ne manquons pas de nous appuyer sur celle-ci lorsqu’un de nos élèves se trouve en difficulté dans l’obtention du CEB 2.

1
http://www.saintjosephboondael.be/contenu/les-chefs-doeuvre
2 Certificat d’Etudes de Base :
http://www.enseignement.be/index.php?page=25527

Jean-Marc Buret

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"Objective" pour une évaluation, cela ne me paraît pas avoir grand sens. Cet adjectif tend à prouver qu'on confond "évaluation" et "jugement". Ces deux notions n'ont strictement rien à voir. 
Comme je le dis souvent, une évaluation doit avoir quatre vertus essentielles : 
  • Elle doit être RARE : trop fréquente, l'évaluation tue l'apprentissage.
  • Elle doit être PRÉCISE : on n'évalue pas tout en même temps : il faut savoir avec précision ce qu'on évalue. Or, la plupart du temps on évalue autre chose que ce qu'on croit. Par exemple, évaluer le savoir lire en faisant lire à haute voix, cela évalue la "haute voix" et pas du tout la lecture. Evaluer des connaissances en histoire par une interro écrite, cela évalue surtout la capacité à produire un texte argumentatif par lequel on prouve que l'on a ces connaissances. Or, la production d'un tel texte n'a jamais été enseignée : bien des élèves qui sauraient répondre oralement aux questions échouent par ce qu'ils ne savent pas écrire ce qu'ils savent...
  • Elle doit être PRÉVUE : on n'évalue ni à l'improviste, ni par surprise. Quand on travaille avec des êtres humains, on doit savoir qu'une évaluation doit être préparée, également par celui qui la subit...
  • Elle doit être ... JOYEUSE : il est en effet impossible qu'il n'y ait pas eu un progrès, si minime soit-il. Et ce progrès est source de joie et de confiance. De toute façon, s'il n'y en a pas, c'est que le moment de l'évaluation a été mal choisi (notamment, trop tôt après l'apprentissage)

Eveline Charmeux

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Evaluer peut correspondre assez facilement à des procédures objectives : un cadre précis et explicite, des supports concrets et univoques, des critères mesurables, …
Le problème vient plutôt du fait que les dispositifs les plus rationnels ne fournissent pas systématiquement des informations fidèles à ce qui a été appris. Par exemple, une évaluation critériée de la résolution d’un problème mathématique n’échappe pas aux biais induits par l’état émotionnel dans lequel se trouvent les élèves soumis à cette évaluation.
Puisqu’apprendre ne peut être qu’une action mentale singulière et que rien ne permet réellement d’accéder à ce qui, au niveau du cerveau, conduit à cet apprentissage, on ne peut au mieux qu’essayer d’évaluer, c’est-à-dire mettre à disposition des informations de mesure, valables pour les outils d’évaluations employés, sans trop de certitude que le produit obtenu soit le même avec d’autres outils.
Dans cette logique, un évaluateur peut être comparé à un médecin qui s’intéresse à la maladie de son patient, la jauge à partir d’un certain nombre d’indicateurs (la température, le pouls, les symptômes, …) afin de poser un diagnostic, le plus sûr possible, mais sans ne pouvoir réellement en attester la certitude. On ne pourrait donc jamais évaluer une compétence, seulement en mesurer la performance, la performance correspondant à ce qui se manifeste de la compétence.
De mon point de vue, objectivité et évaluation ne font donc pas bon ménage parce que la première ne garantit pas la seconde, ce qui, soit-dit au passage, souligne le caractère humain des métiers de l’éducation. Mais peu importe, surtout si l’essentiel, contrairement aux pratiques qui normalisent, hiérarchisent et stigmatisent en premier lieu les élèves qui rencontrent des difficultés, est qu’à travers l’évaluation, l’apprenant et son enseignant (ou son éducateur) puissent disposer d’informations sur ce qui est en train d’être appris, afin, si besoin d’en parfaire le cheminement.


Sylvain Connac

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Qui peut prétendre à une parfaite objectivité mais de là à nager en pleine subjectivité, il y a un pas à ne pas franchir.
On tendra vers cette objectivité en annonçant clairement l’objet de l’évaluation et les critères retenus
.

Michel Derache

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L’évaluation est basée sur le jugement, elle ne peut pas être objective au sens où l’on utilisait cette expression pour désigner les tests constitués d’items à correction objective appelés souvent « tests objectifs ». Ce n’est pas le test comme tel qui est objectif mais bien sa correction car celle-ci ne permet aucune nuance dans le jugement porté : la bonne réponse est unique. Ces tests objectifs fournissent l’occasion de vérifier si les élèves maîtrisent certaines connaissances nécessaires au développement de compétences, mais ne permettent pas d’évaluer une compétence dans sa globalité.
Dans une évaluation où les réponses sont construites, l’enseignant prend toutes les précautions nécessaires pour que son jugement soit éclairé et fonctionnel. Pour y arriver, il doit s’appuyer sur une information de qualité, pertinente et suffisante, et disposer d’une instrumentation appropriée. La liste de vérification, la grille d’évaluation et l’échelle descriptive sont des outils utiles pour porter un jugement (Legendre, 2001). Beckers
(2002) ajoute que les descripteurs et les niveaux d’exigence sont importants pour améliorer l’objectivité des notes et assurer la qualité de la rétroaction aux élèves.
Le jugement est un acte professionnel qui relève de la responsabilité de l’évaluateur et qui, en conséquence, ne peut ni revêtir un caractère de totale objectivité ni être réduit à un algorithme (Wiggins, 1993b). L’enseignant juge si l’élève a suffisamment développé ses compétences ou acquis des connaissances en vue de prendre des décisions et d’agir.
Quelle que soit l’approche privilégiée, le jugement de l’enseignant, pour être considéré comme professionnel, doit être argumenté et documenté. Quatre caractéristiques, décrites dans la littérature favorisent davantage l’objectivité sachant que tout jugement est par nature subjectif.
Pour être professionnel, un jugement doit être :
  • instrumenté,
  • évolutif,
  • fondé sur l’autonomie et la responsabilité et
  • éthique et conforme à un ensemble de valeurs.


Micheline-Joanne Durand

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Je n’irais pas jusqu’à dire que l’objectivité est un leurre. Toutefois, je suis assez d’accord pour dire que l’évaluation comporte une part de subjectivité, une marge d’erreur possible. Il s’agit d’humains qui évaluent d’autres humains. Pas de mètres qui mesurent des tables. En tant qu’évaluateur, on doit tenter de réduire la marge d’erreur, et non pas s’acharner à l’éliminer, nous n’y arriverons pas. L’objectif est d’obtenir un portrait de l’élève qui soit le plus juste possible de ce qu’il est au regard des ses connaissances et de sa compétence. Pour ce, on doit s’y prendre de plusieurs façons, plusieurs angles d’approche, pour réduire la marge d’erreur.

Sylvie Fontaine

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Depuis les travaux de docimologie des années 30, il est ridicule de prétendre à l’objectivité des évaluations. Nous savons bien comment divers critères influencent, le plus souvent à son insu, le correcteur : présentation, soin, connaissance de l’élève, consonance du nom, physique du candidat, ordre de correction des copies. Et puis évaluer, c’est juger. Or qui peut prétendre le faire en toute objectivité ?


Sylvain Grandserre

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Tout ce qui est humain est subjectif... Le problème n'est probablement pas de rendre l'évaluation objective, mais certains apprentissages des élèves le mieux objectivables possible. Sinon, comment parler avec eux, leurs parents, leurs futurs enseignants, etc. de ce qu'ils savent ou non ? Et comment, surtout, contribuer efficacement à orienter leur formation ?

Olivier Maulini

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Cette objectivité est en effet peut-être menacée car notre regard sur les comportements de l’enfant risque de court-circuiter notre évaluation.
Cela me fait penser à une phrase rencontrée lors d’une lecture « Tu deviens ce que je pense de toi ! ».

Martine Meurant

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Certes, l’évaluation est toujours teintée de subjectivité, même si elle est « objectivée » (c’est-à-dire concrétisée, rendue visible, car les critères énoncés) ne serait-ce que par le choix des critères et leur hiérarchisation. Cependant, il est possible de réduire cette part de subjectivité si on se réfère au fonctionnement même de l’objet d’apprentissage. Par exemple, dans le cas de l’apprentissage de l’écriture (la copie de mots en maternelle qui est la situation que j’ai travaillée dans ma recherche), la référence est l’objet « langue écrite » : pour être correctement réalisée, pour qu’on puisse lire le mot, la copie nécessite d’écrire : toutes les lettres (complétude), dans l’ordre (ordre), qu’elles soient reconnaissables (identité ou forme des lettres). L’élève confronte sa propre production à chacun de ces critères, en compagnie du maître. On n’agit pas directement sur l’erreur, on examine le travail à l’aune des critères qui définissent le fonctionnement de l’objet d’apprentissage. On peut ajouter la « linéarité », l’« orientation gauche-droite », les proportions entre les lettres (écriture cursive). On voit ici que la subjectivité n’a pas lieu d’être, sauf si on introduit des commentaires en marge de l’objectif énoncé portant sur le soin, la rapidité, l’application ...


Marie-Thérèse Zerbato-Poudou